Depuis plus de quarante ans, grâce à la générosité et au soutien de nombreux mécènes, l’association de défense et de sauvegarde du patrimoine VMF organise un concours national des plus belles restaurations et mises en valeur d’édifices remarquables. Elle souhaite ainsi encourager la restauration du patrimoine privé sous toutes ses formes et dans tous les domaines. En 2022, une quarantaine de prix nationaux ont été remis pour plus de 215 000 €. Dans ce contexte le Prix VMF – Cabinet Arcas « Patrimoine du XXe siècle », est décerné à l’église Saint-André et Sainte-Jeanne-d’Arc pour un montant de 10 000 euros. Les travaux doivent permettre de restaurer la toiture et poursuivre la réfection des noues.
L’église Saint-André et Sainte-Jeanne-d’Arc de la Rochelle est un monument unique et inclassable du patrimoine rochelais. Il est même le seul monument construit dans le département durant cette période. Il correspond à un des plus purs chefs d’œuvres du style dit « Art Déco » et a l’exceptionnel avantage d’avoir conservé toute son homogénéité de style et de construction depuis son origine sans modification de plan, de mobilier et de structure du bâti. Il correspond historiquement au lieu de culte d’une paroisse créée en 1934 dans un quartier de vignes, champs et jardins. Il est du à l’opiniâtreté et au caractère de son fondateur, l’abbé Crampette, qui sera de plus un héros décoré de la Résistance.
Confiant en la Providence, cet abbé, le chanoine de la cathédrale, influe autour de la construction de cette église une énergie communautaire qui fédère toutes les bonnes volontés des familles de la ville (kermesses, quêtes, et animations récréatives). Prévue au début pour allier pierres de Saintonge et ciment, le plan répondait tout à fait à un projet traditionnel mais ce plan fut rapidement remplacé par celui d’une église de conception plus moderne du à l’architecte Hubert Blanche de Feydeau.
L’architecte conçoit cette fois un édifice pleinement en accord avec les nouvelles tendances de l’architecture religieuse. L’emploi du béton armé lui permet de dégager très largement l’espace central, les collatéraux étant réduits à de simples passages de circulation. Les arcs polygonaux délimitent à l’intérieur des volumes qui semblent taillés comme des prismes. Les parois sont recouvertes d’un mouchetis tyrolien très granuleux et peint. L’extérieur des murs reçut quant à lui un parement en pierre de Saintonge.
L’influence des œuvres de Dom Paul Bellot (1876-1944) est ici tout à fait perceptible; et l’église de Fétilly s’inspire nettement de celle de l’Immaculée Conception d’Audincourt (Doubs) dont le moine-architecte avait dirigé la construction de 1928 à 1932. La structure des travées de la nef est identique: étroits passages latéraux surmontés de claustras intérieures, et surtout prédominance absolue des arcs polygonaux: « il n’y a pas une courbe, pourtant l’effet du vaisseau n’est pas sec » écrivait Dom Bellot. L’église fut bénite le 14 mars 1937.
Cette église, la plus « Art Déco » de Charente Maritime ne représenta pas seulement un renouveau de la l’architecture religieuse, elle vit aussi de nombreux artistes contribuer à son ornementation : dallage des ateliers Beauplet, grilles et ferronneries des serruriers Gerget et Beauchamps, cloches des fonderies Paccard… Dans cette église « tout respire à l’unisson de l’art dominant des années 30 » selon l’expression de Gilles Ragot.
Cette église fut aussi sous l’égide de l’abbé Crampette un haut lieu de Résistance sous la seconde guerre mondiale car dans le presbytère furent cachées des armes sous le plancher tandis que le clocher servait d’émetteur. Depuis la paroisse connait une affluence constante et fervente très attachée à ce lieu de mémoire, de spiritualité et d’art unique en son genre.