Label VMF Patrimoine historique - Manche - Normandie

L’hôtel Pontas du Méril occupe une portion de l’ancien enclos de l’Officialité, dit aussi manoir de la Cohue (cohue: lieu où les petites justices se tenaient), qui fut jusqu’au XVe siècle le siège du tribunal ecclésiastique de Valognes. Le 16 octobre 1652, Gilles Diénis cède ce manoir à Jacques Plessard, seigneur de Négreville et Pontrilly.

Le 10 septembre 1655, ce dernier revend l’ensemble à Robert Barbou sieur des Espars, écuyer, bourgeois de Valognes anobli en septembre 1644, conseiller du Roi. La propriété se composait alors d’un « bout de maison encommencée » (actuel Hôtel Pontas du Méril), destiné à prolonger une construction voisine (l’actuel hôtel Viel de la Haulle).

La construction du nouvel édifice qui dura huit années est achevée en 1663, lorsque Robert Barbou le transmet à son fils Jacques, à l’occasion du mariage de ce dernier en 1663 à Valognes, avec Gabrielle Basan, descendante des Basan de Flamanville.

Jacques Barbou, sieur de Plémarest et de Querqueville était écuyer, maréchal des logis (fourier de la maison) du Duc d’Orléans, de noblesse confirmée en août 1697 puis le 29 mai 1716.

L’hôtel est vendu le 6 août 1789 à Thomas Gallis. Né en 1743, bachelier en droit et avocat au parlement, conseiller du roi, procureur de Valognes, Jean-Thomas Gallis de Mesnilgrand fut maire de Valognes sous la Restauration (1813-1815). Il décéda à Valognes le 4 mai 1828. «En 1789 il s’était allié aux idées nouvelles avait racheté une partie des biens confisqués à la maison de Colbert sous la Révolution et en particulier le manoir de la Cour » (Géraud de Féral, Notes pour servir à l’histoire d’Yvetot-Bocage, p. 144). Jean-Thomas Gallis de Mesnilgrand a servi de modèle à Barbey dans sa nouvelle « Un diner d’athées ».

Le 14 floréal an III (3 mai 1795), Jean-Thomas Gallis de Mesnilgrand revend son hôtel à Jean-Louis Pontas Duméril, qui lui a laissé son nom.

Jean-Louis Pontas-Duméril fut reçu docteur-médecin en 1775 à Caen et exerçait depuis 1776 à Valognes. Libre-penseur, il figure le 31 décembre 1786 parmi les fondateurs de la loge maçonnique « L’Union militaire » réunis chez Timoléon du Parc dans l’actuel hôtel Martin-de-Bouillon. Echevin de la ville, il devient officier municipal en 1789 et premier président de la Société locale des amis de la Constitution. Il prend part à la rédaction des cahiers de doléance pour la ville de Coutances. Elu à la tête du district en juillet 1790, Conseiller général en 1792 il est inquiété sous la Terreur. Anobli par lettres-patentes du 3 février 1815, avec règlement d’armoiries d’or à une foi de carnation tenant un lis au naturel entre deux épées de gueules passées en sautoir au chef d’azur chargé d’un lion d’or, de Pontas-Duméril il devient Pontas du Méril. Il fut maire de Valognes de 1807 à 1813 et de 1817 à 1825. En 1811, il jouit d’un revenu estimé à 10.000 F. Jean-Louis Pontas du Méril était l’oncle de l’écrivain Jules Barbey d’Aurevilly (1808-1889) par son épouse Désirée Marie Louise Ango (1777-1818) – épousée le 29 août 1797 à Saint Sauveur le Vicomte. Le couple a eu trois enfants: Alfred-Louis (1799-1856), substitut près le tribunal de Coutances puis procureur du roi, Edélestand (1801-1871), érudit, poète et philosophe, et Ernestine (1802-1832). Adolescent, Jules Barbey d’Aurevilly vint résider dans l’hôtel dans le but de poursuivre ses études au collège de Valognes, de 1818 (ou 1821 selon les sources) à 1825. Il y conçut un amour de jeunesse pour sa cousine Ernestine, de six ans son aînée.

« Jean-Louis Pontas-Duméril, assez mal vu sans doute de la société valognaise, ne put guère y introduire son neveu, mais il lui en conta les secrets, thèmes de futures Diaboliques, et lui transmit peut-être ses rancunes. Barbey d’Aurevilly l’a peint dans une de ses Diaboliques (Un Bonheur dans le Crime) sous les traits du docteur Torty. »

C’est au moment de la Reconstruction suite aux bombardements de 1944 qu’un nouveau tracé est défini pour la rue de l’Officialité, reliant la place Vicq d’Azir à la rue du Petit Versailles.

Le corps de logis entre cour d’arrivée et jardin possède un rez-de-chaussée surélevé et un étage carré, supportés par un étage de soubassement.(Rez-de-Jardin). Ouvrant de plain-pied sur la cour, le rez-de-chaussée domine en revanche les jardins situés sur l’arrière de la propriété.

L’Hôtel PONTAS du MERIL occupe une place à part parmi les autres hôtels particuliers de Valognes, aussi bien en raison de sa date de construction, antérieure à celle de la plupart des autres constructions, que par le soin apporté à sa façade. Il peut être rapproché du « logis de l’abbesse » de ‘ancienne abbaye bénédictine royale de Valognes, où l’on retrouve, vers le milieu du XVIIe siècle, un traitement en bossages de la façade dans un « style Louis XIII » assez comparable et sa rangée de modillons.

L’accès aux étages se fait par un remarquable escalier droit intérieur rampe-sur-rampe avec garde-corps à balustres . Un très beau Salon d’Apparat avec ses boiseries permet d’apprécier la beauté des jardins.